Jetons un coup d’œil dans le rétro sur ce qui se passait dans les rues de Segré et aux alentours en cette fin mai 1968.
Dans les rues
Le lundi 27 mai 1968 au matin, une manifestation réunissait 2 000 personnes en grève, sur la place de la Mairie de Segré pour un meeting. Parmi elles, «un important contingent de femmes et de jeunes filles», indique notre confrère, «ainsi que de très nombreux enseignants bientôt rejoints par les ardoisiers de Bel-Air et les mineurs du fer». La troupe s’est mise ensuite en marche vers la sous-préfecture où ses membres ont remis une motion au locataire de l’époque, M. Rozier.
Au menu des revendications : la situation de l’emploi, très mauvaise dans la région de Segré, qui exige «des pouvoirs publics des mesures immédiates ». Le mois de mai s’avance et reste chaotique. Ainsi, et compte tenu de ces événements, le bureau du commerce à Segré, par exemple, a décidé «le report de la quinzaine commerciale».
Dans les champs
Mai 68 fait marcher les foules mais pas les moteurs. En cause, la pénurie d’essence qui «ramène 25 ans en arrière à l’époque de l’Occupation». Alors les pratiques d’antan reprennent du service pour gérer le quotidien : «les carrioles ont fait leur apparition, et dans les champs, les chevaux viennent relayer les tracteurs en panne». Des métiers en voie de disparition regagnent même de l’intérêt : «Les forgerons retrouvent des clients, les poulinières retrouvent leur activité et les fers à leurs sabots ».
Dans les entreprises
Les concertations sont légion. Des réunions d’information ont lieu chez Cassegrain et Pullman. Côté scierie Juret, «après une entrevue avec le patronat, la trentaine d’ouvriers a repris le travail». Même décision «après un vote à bulletin secret pour la cinquantaine d’ouvriers des tanneries Lepage», comme pour les garages du Segréen. Chez Paulstra, on se concerte aussi (lire ci-dessous).
En cette fin de mai, le conseil municipal de Segré a été reporté tandis que les employés municipaux ont décidé après un vote à bulletin secret de reprendre le travail. «Aussitôt après, tout le personnel avait repris place derrière les guichets de l’hôtel de ville ou à d’autres postes, et les éboueurs ramassaient les poubelles qui s’amoncelaient sur le trottoir». La piscine fermée le mardi 26 après-midi pour cause de grève a rouvert le lendemain.
Dans l’enseignement
Les enseignants des écoles privées se sont réunis le 29 mai et ont décidé la reprise le 31. à Noyant-la-Gravoyère, «sur l’initiative du conseil des parents de l’école publique et de M. Dupuis, instituteur, les enfants de grévistes de la commune se sont vus servir mercredi à midi un repas gratuit». Au lycée, «aucun accord positif n’étant intervenu sur le plan national, le comité de grève a décidé de maintenir le mouvement».
... et la pêche continue
Mais les animations continuent : fêtes et kermesses, boule de fort, cyclisme, foot et son insolite équipe pour les tournois de sixte, les MF de Segré (manœuvres de force). Et les concours de pêche continuent d’appâter, à Gené, ou aux étangs de la Corbinière au Bois I Noyant-la- Gravoyère.
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Paulstra : un accord, et une reprise... informatique
Michel Blanchard était à la tête de Paulstra en Mai-68. Jeune ingénieur en provenance de Châteaudin, il commence en 1962 comme directeur technique, puis devient directeur en 1964.
Il se souvient que l’entreprise a été dans les dernières à «s’être mise en grève dans le Segréen». Mais elle n’échappera pas à ce piquet qui tombe à un moment où «l’on ne pouvait pas laisser se perdre tout le travail effectué depuis des mois». Michel Blanchard a besoin de cinq personnes pour effectuer la reprise informatique.
Cette informatique-là, c’est le règne des «cartes perforées à 80 colonnes», et en la matière, «nous étions très en avance», dit-il. L’ordinateur géant est situé au siège, climatisé, à Levallois. «J’ai eu la chance d’avoir des syndicats compréhensifs» avec qui «nous avons signé un contrat permettant à cinq salariés de pouvoir entrer dans l’entreprise pendant une semaine». Objectifs atteints : réalisation de la reprise informatique, sauvegarde de la gestion des commandes et des achats.
La suite et la fin de Mai-68 à Segré comme en France, on la connaît : De Gaulle descend les Champs-élysées... et la vie repart. « Les syndicats m’ont informé de la reprise», poursuit Michel Blanchard. Les quelque 400 salariés que compte Paulstra à l’époque ont alors regagné leurs postes.
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Après les événements de mai 1968 et les accords de Grenelle...
- le SMIG (remplacé par le SMIC en 1970) passe de 2,20 à 3 francs.
- La baguette coûte 45 centimes
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