Au Haut-Aviré à Azé commune de Château-Gontier-sur-Mayenne, sur 32 hectares, les 1 036 arbres de haute tige sur des bandes enherbées de 2 mètres de large d'essences variées (acacias, chênes, cerisiers, châtaigniers, tilleuls, etc.) ont bien poussé. Les 17 rangées espacées tous les 30 mètres dessinent une forêt en devenir.
Des atouts
« On est pris pour des fous. Mais l'idée est d'apporter, à terme, de l'ombre aux animaux (des bovins Rouges des Prés), l'été quand il fait chaud, et de permettre aux cultures de pousser sur des sols riches en humus favorisé par les mycorhizes, le résultat de l'association symbiotique entre des champignons et les racines des arbres, explique Christophe Piquet, agriculteur retraité à l'origine du projet d'agroforesterie avec son fils Antoine. La végétation créée retiendra l'eau - une alternative à l'idée des bassines -, ce qui évitera l'érosion, les coulées de boue, etc. ». Père et fils ont posé un acte fondateur pour préserver l'agriculture. « Quand on est grand-père, il faut penser à nos petits-enfants. »
« Je ne connaissais pas grand-chose aux arbres », reconnaît Christophe qui, pendant longtemps, en a coupé beaucoup. Aux antipodes d'un modèle rationaliste imposé, il a fait le choix de laisser de la place au vivant lequel portera « ses fruits aux enfants d'Antoine ». « De toute façon, il faut pourtant agir. »
Sur l'exploitation qu'il a transmise à son fils aîné, les premiers bienfaits de l'agroforesterie nouvellement en place apparaissent : « Pour preuve, quand il tombait 30 mm de précipitations dans la journée, l'étang en contrebas de la parcelle boisée débordait. Là, malgré l'hiver pluvieux, il ne s'est rempli que fin mars. Cela veut dire que l'eau ruisselle déjà moins, la terre avec ses arbres l'absorbe. Cela signifie qu'on a redonné de la vie au sol qui retient mieux l'eau, et qui l'épure. »
La biodiversité y gagne : « On revoit des oiseaux, des chouettes, des petits animaux, des mulots, notamment, et des turricules (déjections des vers). Dans une terre saine, tout le monde se plaît. Les sols sont plus riches grâce au couvert végétal. Il faut savoir que 1 kg d'humus, c'est 10 litres d'eau stockée. »
L'agroforesterie vient en complément des prairies, des rotations et des haies. « Ainsi pas de pollution, pas de gaspillage, on aurait dû toujours faire comme ça. »
L'arbre régule
Christophe Piquet a pris conscience des enjeux agro-environnementaux au contact de professionnels tels que Cyril Barbé, conseiller en agroforesterie de Segré-en-Anjou Bleu, qui l'accompagne.
« Car il faut une attention aux arbres, bien les tailler ; c'est différent suivant les espèces. Certains meurent, il faut les remplacer. Au début, on a eu 10 % de perte. C'est du temps pour entretenir, confie Christophe Piquet. Et de la main-d'œuvre qu'il nous faut trouver ». Tel est le prix à payer.
Comme lui, « des propriétaires sont intéressés pour (re) naturer, observe Cyril Barbé. Mais l'arbre fait encore peur. D'aucuns arguent l'entretien, d'autres la réduction des surfaces. Il y a un blocage. » Un chiffre l'atteste : « 23 000 km de haies par an sont supprimées. Or l'arbre régule les sols, l'eau, l'air. Il va falloir l'intégrer dans le système d'exploitation comme une solution face aux aléas climatiques ».
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