A côté du président du tribunal Bruno Thouzellier, un carton. Il contient le dossier d'instruction de l'affaire dans laquelle un notaire du Sud-Mayenne est poursuivi. Ce sexagénaire, toujours en activité, est suspecté de faux, d'usage de faux, d'abus de confiance et d'extorsion auprès d'un couple. C'est le tribunal correctionnel de Laval qui se penche sur son cas, jeudi 20 septembre.
Honoraires et successions
«Nous avions une relation de confiance avec lui», témoigne la femme. A les entendre, grand mal leur en a pris. Les soupçons commencent alors que le couple veut céder un appartement, situé boulevard Haussman à Paris, à ses enfants. Pour cette donation, qui nécessite une assemblée générale car le bien est géré par une société civile immobilière (SCI), le prévenu leur facture des honoraires s'élevant à 33 000 euros. Parents et enfants n'ont pas été informés de ces frais. «Je ne peux pas enregistrer si je n'ai pas le chèque », leur intime le notaire.
Il est ensuite question des successions des grands-parents. Dans ce cadre, le notaire est chargé d'une mission judiciaire. Il facture des honoraires « non conformes aux pratiques et aux déontologies de la professsion», estime la chambre interdépartementale des notaires. Des mouvements d'argent, à hauteur de 40 000 euros, serait également suspects.
Pis, il a fait signer aux victimes des reconnaissances de dettes de 71 000 et 61 000 euros, en se rendant à leur domicile, refusant de partir sans la signature. Si elle cède, lui non. On retrouvera pourtant sa signature sur plusieurs documents. Une paraphe que l'expertise graphologique explique être une contrefaçon. Sans parler des papiers antidatés.
«Ce sont des mensonges»
«Leurs déclarations sont fausses, ce sont des mensonges, se défend le prévenu. Je ne peux pas continuer à travailler gratis.» Il indique avoir inventé une technique juridique et notariale pour justifier ces honoraires. Le prévenu a un passif : il y a une quinzaine d'années, il a été suspendu professionnellement deux mois.
«Cette sanction ne lui a pas suffi », plaide maître Eric Deprez, l'avocat du couple. Ce dernier réclame l'indemnisation du couple. L'avocat de la chambre interdépartementale des notaires note « un problème comptable majeur» et souhaite l'euro symbolique, au titre du préjudice d'image. Le procureur Guirec Le Bras retient la situation financière «difficile» du prévenu, qui aurait pris les plaignants pour «des vaches à lait», victimes d' «un rapport de force». Il requiert trois ans d'emprisonnement, dont 30 mois avec sursis, et l'interdiction définitive d'exercer.
Pour maître Fillion, avocat de la défense, «la situation économique du prévenu a pu avoir une influence sur ce qui a pu se passer». Mais l'avocat réfute un à un les faits reprochés à son client et plaide la relaxe. L'affaire a été placée en délibéré. Le jugement sera rendu le 8 novembre.
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